La conception traditionnelle selon laquelle l’entreprise n’intègre que les avis de ses actionnaires dans sa prise de décision est complètement révolue. En effet, on parle plutôt maintenant de stratégie de concertation, de transparence et de création commune de valeur. Les entreprises sont de plus en plus conscientes des enjeux sociaux et environnementaux du 21e siècle et elles cherchent aujourd’hui à créer du dialogue avec leurs parties prenantes pour prendre un tournant plus responsable et durable.
Tout d’abord, il est important de définir ce qu’est une partie prenante. On peut y regrouper l’ensemble des personnes morales ou physiques qui participent de près ou de loin à la vie économique de l’entreprise. Les parties prenantes peuvent être directement décisionnaires (dirigeants, salariés), elles peuvent observer l’entreprise (ONG, syndicats) ou elles peuvent aussi influencer plus ou moins les décisions (collectivités locales, par exemple). En résumé, les parties prenantes, qu’elles soient internes ou externes, ont toutes des intérêts dans les activités de l’entreprise. Afin de mieux connaître ses parties prenantes, l’entreprise peut commencer par faire une cartographie de tous les acteurs ayant un impact, plus ou moins important, sur ses décisions. Il peut être intéressant de lister, de façon exhaustive, l’ensemble des parties prenantes puis de les hiérarchiser selon leur niveau d’influence. À la suite de cela, on peut plus facilement mettre en place un plan d’action et de communication selon les différentes familles de parties prenantes.
La norme ISO 26 000
Relative à la responsabilité sociétale, préconise aux entreprises voulant mettre en place une stratégie RSE, d’intégrer les parties prenantes à leur prise de décisions. Cela permet d’installer un climat de confiance et donc, par la même occasion, de mieux maîtriser les risques qui menacent l’entreprise. Afin de mieux comprendre les attentes des parties prenantes, il est, avant tout, nécessaire de construire une matrice de matérialité qui est l’outil indispensable lorsque l’on parle de dialogue entre entreprise et parties prenantes. Cette dernière permet de hiérarchiser les enjeux économiques, financiers, environnementaux et sociaux propres à l’entreprise afin de les mettre en relation avec les différentes perspectives des parties prenantes. Ainsi, en travaillant en collaboration avec toutes les parties prenantes, on sort de la logique purement financière et on sert les intérêts de tous. Cette co-construction permet ainsi à l’entreprise de valoriser la dimension sociale de sa stratégie RSE à travers la communication interne et externe et donc de bénéficier d’une meilleure réputation auprès de ses collaborateurs, interlocuteurs et consommateurs. De plus, en impliquant ses parties prenantes dans des engagements à action positive, l’entreprise accroît la motivation des individus à participer à des projets. Ils se sentent alors d’autant plus concernés et sont plus enclins à accepter le changement, qui est le fruit d’une concertation. Ainsi, l’entreprise gagne en performance et en productivité ce qui lui permet d’augmenter, de manière significative, ses chances de réussite.
Pour faire adhérer ses parties prenantes à sa stratégie d’entreprise et plus particulièrement, à sa stratégie RSE, il est nécessaire de passer par plusieurs étapes :
La sensibilisation et l’éducation
Il est, tout d’abord, important d’informer ses parties prenantes sur les enjeux environnementaux et sociaux qui nous entourent et surtout ceux qui incombent à l’entreprise. On va faire appel à la conscience morale et à la responsabilité sociale de chaque individu afin de déclencher une prise de conscience chez ses parties prenantes, ce qui va les pousser à s’investir plus dans ces sujets. L’important est que les parties prenantes se rendent compte des avantages et des bénéfices que peut leur apporter une stratégie RSE. Une fois les différentes problématiques comprises, il va être nécessaire de dispenser des formations aux parties prenantes, faites par l’entreprise elle-même ou alors par des organismes externes.
Pour que les collaborateurs puissent adhérer à la démarche RSE de l’entreprise et la déployer au mieux, il est essentiel de mettre en place des formations opérationnelles et adaptées à chaque métier. On peut, à titre d’exemple, former les ingénieurs à l’écoconception, les managers au management responsable ou encore montrer aux acheteurs comment intégrer une politique d’achats responsables. Il est important d’expliquer précisément les fondements de la stratégie RSE et de la transposer aux différentes compétences présentes dans l’entreprise. De plus, il est capital de faire comprendre à l’ensemble des collaborateurs, au travers d’affiches et de newsletters, la nécessité de mettre en place des éco-gestes dans leur quotidien.
La mobilisation
L’entreprise doit sans cesse encourager les initiatives et la prise de responsabilités chez ses parties prenantes, qu’elles soient externes ou internes à l’entreprise. Il faut toujours solliciter leur implication et collecter leurs avis grâce à des enquêtes, des sondages et des interviews. Cela peut aussi être grandement bénéfique pour l’entreprise en termes d’innovation.
Par exemple, on peut organiser des réunions de concertation avec ses principaux fournisseurs pour échanger à propos d’une politique d’achats responsables ou encore envisager de mettre en place une nouvelle charte en accord avec eux, en prenant en compte leurs contraintes ainsi que celles de l’entreprise. On fait alors des fournisseurs des partenaires investis dans sa stratégie RSE avec qui on co-construit une nouvelle politique.
Il est aussi intéressant de mettre en place un panel parties prenantes comme l’ont fait des groupes comme Carrefour, Lafarge, Areva ou encore même EDF. Ces panels consistent à réunir, plusieurs fois par an, l’entreprise et ses parties prenantes afin d’échanger sur les problématiques RSE. L’entreprise va alors en profiter pour recueillir des conseils, attentes et critiques de la part de ses parties prenantes (appelées ici panélistes) sur sa stratégie Développement Durable. Par exemple, Lafarge fait appel à son panel pour qu’il donne son avis, chaque année, sur la dernière version de leur rapport RSE. Areva, quant à lui, organise des rencontres avec des parties prenantes à l’international, afin de récolter les points de vue d’autres cultures.
La communication
Pour terminer, il est primordial de rendre des comptes à ses parties prenantes, il faut leur donner un suivi de la démarche RSE avec des indicateurs de performance. La communication doit être adaptée pour chaque type de partie prenante et elle doit seulement prendre en compte les informations qui les intéressent. L’entreprise, pour rendre les indicateurs plus accessibles, peut faire des ratios par collaborateur ou par client et elle peut même afficher des équivalences qui sont souvent plus parlantes. L’attention des parties prenantes est ainsi retenue et elles se sentent d’autant plus concernées. Dans un second temps, il est essentiel de communiquer ses résultats de manière concrète à travers le rapport RSE afin que les parties prenantes réalisent l’impact de leur implication dans la stratégie de l’entreprise et qu’elles y voient aussi les bénéfices pour eux. Si cela est possible, il est très important de récompenser les parties prenantes les plus engagées.
Le rapport de performance extra-financière est aussi très valorisant auprès de ses consommateurs qui sont de plus en plus intéressés par des entreprises engagées. En valorisant ses actions positives à travers la communication externe, on permet à l’entreprise de retenir ses consommateurs, mais aussi d’en attirer de nouveaux.
Pour conclure, on peut dire que les parties prenantes sont essentielles à la mise en place d’une bonne stratégie RSE. Le dialogue et la concertation sont au cœur d’une démarche responsable et chacun, peu importe sa place dans la chaine de valeur, peut apporter des idées nouvelles et permettre à l’entreprise d’évoluer. Pour faire adhérer les parties prenantes à sa stratégie RSE, il est indispensable de les intégrer dans le processus de décisions en les informant, en échangeant et en communiquant avec elles.
Charlotte BRAY – Consultante développement durable