85% des Français s’inquiètent des conséquences du changement climatique (OFCE, 2018) et la plupart des personnes interrogées en attribuent la responsabilité aux gouvernements, à la communauté internationale et aux entreprises et industries du secteur privé. L’intégration des parties prenantes dans les stratégies énergie-carbone est rapidement devenue un gage de transparence et de réussite. Que ce soit les collaborateurs, fournisseurs ou des partenaires externes, ils ont tous un rôle à jouer dans une stratégie carbone. Informés, consultés, sensibilisés et inspirés, ils seront plus à même de participer à l’effort engagé par l’entreprise.
Sensibiliser les parties prenantes pour qu’elles se sentent concernées
Diffusion de chiffres clés, démocratisation des enjeux, vulgarisation des phénomènes scientifiques… de nombreux outils sont à la disposition des entreprises pour sensibiliser leurs parties prenantes et expliquer la vision derrière une stratégie énergie-carbone. Donner des informations à fort impact est essentiel, mais certains écueils sont à éviter :
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Vouloir trop en dire et perdre le destinataire du message en détail ou en jargon
Si être précis dans la description de processus scientifiques, ou pointilleux lors de communication de statistiques est louable, il arrive parfois qu’on perde le destinataire du message par une abondance de détails. Également, un seul chiffre fort aura toujours plus d’impact que des données trop abstraites : « Le transport est le deuxième contributeur de gaz à effet de serre dans le monde» est plus parlant que « Le transport a été responsable de 13,41 gigatonnes de CO2 en 2017 » (source ADEME).
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Être trop alarmiste
Le changement climatique est une menace inédite qui nécessite la mobilisation de tous. Pour autant, une surabondance de données rendant compte de la gravité de la situation, d’un seul coup et sans les tempérer risquerait, certes de sensibiliser l’interlocuteur, mais surtout de laisser penser que la situation est trop grave pour y remédier. Ainsi, tout engagement de la part de l’interlocuteur serait vain. Il est donc important de prévoir des exemples montrant que leur implication peut avoir un impact concret : «Prendre un covoiturage pour un déplacement professionnel, plutôt qu’une voiture par personne permet d’économiser XXX de CO2 ».
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Être accusateur
Si tout le monde peut agir contre le changement climatique, tout le monde a une part de responsabilité. Pointer du doigt un secteur de l’entreprise, voire des personnes spécifiques, peut s’avérer contreproductif et placer les interlocuteurs sur la défensive. C’est aussi créer une barrière entre les parties prenantes elles-mêmes, qui pourrait anéantir une mobilisation collective.
Donner les clés concrètes aux parties prenantes pour agir :
Suite logique du précédent point, une fois les parties prenantes sensibilisées et informées, une de leur première question sera : « Comment puis-je participer à la stratégie énergie-carbone ? »
Leur participation concrète peut prendre de multiples formes et sera spécifique à chaque entreprise. Pour autant, il existe trois façons plus traditionnelles de permettre aux parties prenantes de se sentir davantage impliquées dans la stratégie énergie-carbone :
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Solliciter l’avis/le concours des parties prenantes
Que ce soit pour la stratégie énergie-carbone en elle-même, ou les plans qui vont en découler, la participation active des parties prenantes leur assure une forme d’écoute et donc d’implication. Par exemple, dans le cadre des plans de mobilité en entreprise (aussi connu sous le nom de plans de déplacement), une sollicitation des parties prenantes en amont ou en aval du plan permet une meilleure prise en compte des besoins locaux et assure une forme d’écoute des parties prenantes, engageant la co-construction du projet. Les plans de mobilité permettent d’optimiser les déplacements des collaborateurs, des fournisseurs et des visiteurs sur certains sites. Pourquoi dans ce cas, ne pas envisager un questionnement plus qualitatif des parties prenantes ? :
« Quels sont, d’après vous, les obstacles à la réduction de l’utilisation de la voiture thermique par personne seule ? »
« Qu’est-ce qui pourrait-vous encourager à prendre les transports en commun ? »,
« Avez-vous déjà pris un covoiturage ? Si oui, seriez-vous disposé à partager votre voiture avec un collègue ? ».
Pourquoi, également, ne pas envisager d’organiser des ateliers où les parties prenantes auraient la possibilité de formuler des attentes, ou de proposer des idées.
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Former aux éco-gestes
La réduction de l’empreinte carbone passe aussi par un apprentissage des bons gestes et des bonnes habitudes à avoir. Il en existe une liste très longue et variée. Au-delà des éco-gestes plus traditionnels, souvent connus des parties prenantes, certains sont spécifiques à l’activité. Ils pourront dépendre par exemple, des postes d’émissions les plus élevés ou bien d’émissions faciles à diminuer ou encore de certaines activités mises en avant par le Système de Management de l’Environnement. Pour réaliser des économies à grande échelle, toutes les parties prenantes doivent être formées, y compris les fournisseurs. L’idéal est de les soutenir dans l’organisation de formation pour leurs propres salariés.
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Choisir ses prestataires selon des critères durables
Lors d’un appel d’offre ou d’une simple recherche d’un nouveau fournisseur, l’entreprise peut intégrer dans son cahier des charges des clauses spécifiquement liées au développement durable et à sa stratégie énergie carbone. Cette mesure encouragera les prestataires à changer leurs pratiques au sein de leur propre structure pour se conformer à ces demandes. Egalement, les collaborateurs de l’entreprise cliente pourront voir que la stratégie énergie-carbone se déploie à une échelle qui va au-delà de l’interne.
Montrer l’exemple et donner l’envie d’agir :
Pour éviter de créer une distance entre les parties prenantes et l’entreprise dans le cadre d’une stratégie énergie-carbone, il est important que l’entreprise prenne des mesures qui ne soient pas uniquement le fruit de l’effort de ses parties prenantes. L’idée est d’impliquer les parties prenantes en montrant l’exemple. Sans quoi, il y a un risque que toutes les étapes précédentes soient perçues comme une approche plus « donneur d’ordres » que réellement « participant à l’effort ».
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Rénover ses bâtiments et faire évoluer sa flotte automobile
Selon l’observatoire de l’immobilier durable, pour l’année 2017, la majorité des bâtiments faisant office de bureaux ayant été audités, sont classés en « E », dans leur diagnostic de performance énergétique . Sachant que la pire note possible est « G » et que la meilleure est « A », il est facile de voir qu’il reste encore du chemin à faire. D’autant que le bâtiment toutes catégories confondues est le quatrième plus gros émetteurs de gaz à effet de serre. Certaines entreprises sont d’ailleurs éligibles aux Certificats d’économies d’énergie et peuvent donc bénéficier de soutien financier lorsqu’elles réalisent des travaux de rénovation de leurs bâtiments. Pour ce qui est de la flotte automobile, des investissements vers des voitures plus propres sont un levier de réduction des émissions de gaz à effet de serre, mais aussi un moyen de montrer, au cœur du quotidien des collaborateurs, qu’il y a un réel projet d’entreprise en ce sens.
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Compenser son impact
En compensant ses émissions de gaz à effet de serre, l’entreprise montre à nouveau à ses parties prenantes qu’elle ne se contente pas de dire, mais qu’elle agit. Voyant que la démarche énergie-carbone de l’entreprise va plus loin que la recherche de réduction d’émission et la réorganisation, les parties prenantes ne pourront que soutenir davantage la démarche. Il existe de nombreux outils de compensation labellisés disponibles : reforestation ou préservation d’hectares de forêt, aide à la réalisation d’économies d’énergie pour des personnes en situation de précarité, investissements dans les énergies renouvelables, etc.
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Mobiliser les dirigeants afin qu’ils donnent l’exemple
Ce point peut sembler relativement simple et pourtant dans certaines entreprises, il peut être à l’origine d’une implication et d’une mobilisation plus forte des parties prenantes. Un dirigeant d’entreprise venant à vélo, roulant en voiture électrique pour ses déplacements, vigilant à éteindre son ordinateur en partant, etc…Autant d’actions qui peuvent montrer encore une fois l’exemple auprès des parties prenantes et les encourager à faire de même.
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Organiser ou participer à des actions externes à l’entreprise
L’entreprise peut aussi choisir de soutenir un projet ou de rejoindre un réseau de partenaires dont l’objet est en cohérence avec sa stratégie énergie carbone. Elle pourra directement ou indirectement participer à des actions de lobbying en faveur du climat.
Laetitia LANGLOIS – Consultante Climat-Air-Énergie
[1] http://www.planbatimentdurable.fr/IMG/pdf/version_2017_du_barometre_de_l_oid.pdf