Des liens étroits
Le changement climatique est avéré et a déjà de nombreux impacts. Il va en avoir également de nombreux d’ici la fin du siècle. Le niveau moyen des mers augmente et va augmenter de 18 à 59 cm, l’acidité des océans progresse, la couverture neigeuse et la banquise diminuent, de fortes précipitations et des vagues de chaleur sont de plus en plus fréquentes, les cyclones tropicaux sont plus intenses et les courants océaniques ralentissent. De nombreux systèmes naturels sont touchés, par exemple le GIEC a observé 550 espèces végétales et animales et 80% d’entre elles ont déjà eu à subir un changement imputable au réchauffement planétaire.
Les espèces d’un très grand nombre d’écosystèmes sont aujourd’hui menacées par ces modifications, rendant ces écosystèmes eux-mêmes en danger alors qu’ils ont contribué à dessiner les paysages qui nous entourent et la diversité des espèces qui y habitent, et c’est eux aussi qui ont contribué à l’agriculture et à l’alimentation humaine, à la qualité de notre santé et qui ont modelé nos civilisations, notre culture et notre économie.
Comment le changement climatique impacte-t-il concrètement notre biodiversité ?
- Le changement des concentrations de CO2 dans l’atmosphère, de précipitations, de température impacte le métabolisme et le développement des animaux, la croissance, la respiration et la composition des tissus végétaux et la photosynthèse. Par exemple, le poids moyen des chamois dans le massif alpin a diminué de 25%, depuis 1980, une adaptation à la hausse des températures de montagne. De plus, la modification d’un seul de ces paramètres peut favoriser une espèce au détriment des autres et générer un déséquilibre au sein d’un écosystème.
- Les périodes de migrations, de reproduction, de floraisons, de ponte etc. peuvent s’allonger ou se raccourcir, débuter plus tôt ou plus tard ce qui peut être problématique par exemple en arboriculture où les périodes de floraisons peuvent avancer et ainsi souffrir des gelées tardives ce qui affectera le rendement. Des études ont montré qu’une augmentation d’un degré Celsius provoquerait une baisse de rendement à l’échelle mondiale entre 3 à 7% selon les cultures. On peut mentionner également le fait que 28 000 oies cendrées ont hiverné en France en 2011, contre 10 en 1968. En effet, normalement cette espèce traverse notre pays pour aller hiverner en Espagne. La hausse des températures a pour conséquence d’offrir un milieu favorable à l’espèce pour hiverner. Cette modification de comportement est directement due au changement climatique.
- Les végétaux et animaux vont migrer vers d’autres lieux qui leur conviennent mieux en cas de hausse de température, mais certaines espèces n’arriveront pas à s’adapter et risquent de disparaître prématurément. C’est notamment le cas pour la faune et flore spécifique des montagnes qui peineraient à trouver un autre milieu favorable à proximité.
Ces modifications de la biodiversité, à leur tour, vont influer sur le climat local et mondial en modifiant l’absorption et l’émission des gaz à effet de serre, l’évapotranspiration (le transfert de l’eau de la plante vers l’atmosphère) et l’albédo (le pouvoir réfléchissant du sol), qui jouent sur la température. De même, des changements dans la structure des communautés biologiques des couches océaniques (notamment dans les différentes communautés de microorganismes tel le plancton) peuvent modifier l’absorption du CO2 par les océans et engendrer des modifications climatiques (positives ou négatives).
Si on s’intéresse juste au système océanique, sa réorganisation va transformer le paysage planétaire. Les conflits pour la ressource halieutique vont se multiplier alors que les services écosystémiques marins en termes de régulation et d’approvisionnement représentent entre 15 000 et 51 000 milliards d’euros chaque année, soit plus que le produit national brut de tous les pays du monde !
La diversité biologique peut réduire les conséquences des changements climatiques. Il faut adopter des stratégies liées au maintien de la biodiversité : gestion des habitats des espèces menacées, création de refuges, création de réseaux d’aires protégées sur terre comme en mer, maintien des écosystèmes indigènes, amélioration la résistance des écosystèmes artificiels et naturels aux changements climatiques, réintroduction de la biodiversité en ville, création et maintien des continuités écologiques, pratique d’agriculture et sylviculture stockant du carbone etc. Ce sont autant de pistes d’actions possibles afin de lutter contre l’érosion de notre biodiversité tout en atténuant les conséquences des changements climatiques. Ces deux phénomènes sont donc intimement liés.
Pauline Herrmann, Consultante Biodiversité
Sources :
- CNRS
- GIEC
- PNUE
- IPBES
- MNHN
- La France Agricole